Depuis janvier 2025, de nouvelles règles européennes transforment la façon d’évaluer les biens immobiliers. Ces « European Valuation Standards » (EVS) impactent directement vos projets, que vous soyez propriétaire, acheteur ou professionnel. Décryptage pratique de ce qui change concrètement.
Pourquoi ces nouvelles règles maintenant ?
Deux raisons principales expliquent cette évolution :
Les interdictions de location arrivent à grands pas. Les logements classés G ne pourront plus être loués dès 2025, suivis des F en 2028 et des E en 2034. Il fallait adapter les méthodes d’évaluation à cette réalité.
Les banques européennes doivent désormais respecter de nouvelles règles prudentielles qui les poussent à être plus vigilantes sur les garanties immobilières qu’elles acceptent.
Ce qui change pour l’évaluation des « passoires thermiques »
La nouvelle méthode obligatoire
Avant, un expert pouvait se contenter de mentionner qu’un bien était mal classé énergétiquement. Maintenant, pour tout bien DPE F ou G, il doit obligatoirement :
- Estimer la valeur après rénovation (une fois le bien remonté en classe C par exemple)
- Calculer le coût réel des travaux nécessaires
- Déduire ces coûts pour obtenir la valeur actuelle
Exemple concret
Maison 120m² classée G :
- Valeur comparative actuelle : 300 000€
- Valeur estimée après rénovation (classe C) : 320 000€
- Coût des travaux (isolation, chauffage) : 60 000€
- Nouvelle valeur d’expertise : 260 000€
Cette méthode donne une vision plus réaliste car elle intègre les dépenses obligatoires à venir.
L’impact sur les transactions
Si vous vendez un bien mal classé
Attendez-vous à :
- Des décotes plus importantes qu’avant
- Des négociations plus serrées avec les acheteurs
- Des difficultés de financement pour vos acquéreurs potentiels
Stratégies possibles :
- Faire réaliser une étude de faisabilité des travaux avant la vente
- Ajuster votre prix en tenant compte des coûts de rénovation
- Cibler des acheteurs-investisseurs prêts à rénover
Si vous achetez un bien énergivore
Nouvelles vérifications indispensables :
- Demandez les factures énergétiques des 3 dernières années (données réelles)
- Faites chiffrer précisément les travaux par un professionnel
- Vérifiez la faisabilité technique des améliorations (contraintes patrimoniales, copropriété)
Points de négociation : Les nouvelles règles d’expertise renforcent votre position pour négocier une baisse de prix correspondant aux investissements nécessaires.
Les nouveautés pour les banques
La « valeur prudente » : un nouveau garde-fou
En plus de la valeur de marché classique, les banques peuvent maintenant demander une « valeur immobilière prudente » qui :
- Exclut les anticipations de hausse spéculative
- Tient compte de la durabilité de la valeur sur 15-25 ans
- Intègre les risques d’obsolescence énergétique
Conséquences pratiques
Pour vos emprunts :
- Les biens mal classés pourraient obtenir des financements moins avantageux
- Les banques seront plus vigilantes sur la localisation et l’état général
- La performance énergétique devient un critère de risque
Ce qui change selon votre situation
Propriétaires occupants
Actions recommandées :
- Vérifiez le DPE de votre bien (validité 10 ans)
- Si vous êtes en F ou G, étudiez les travaux prioritaires
- Consultez les aides disponibles (MaPrimeRénov’, éco-PTZ)
Bonne nouvelle : Pas d’obligation de travaux si vous occupez votre logement.
Propriétaires bailleurs
Obligations à respecter :
- DPE G : interdiction de louer dès janvier 2025
- DPE F : interdiction en 2028
- Travaux obligatoires ou vente nécessaire
Planning conseillé :
- Audit énergétique professionnel en priorité
- Demande de devis détaillés
- Montage du financement (aides + éventuellement prêt)
Investisseurs
Nouvelles opportunités :
- Biens décotés à rénover (si les chiffres restent cohérents)
- Marché locatif moins concurrentiel après éviction des passoires
Vigilance renforcée :
- Vérification systématique de la faisabilité des travaux
- Prise en compte des délais et contraintes techniques
- Calcul de rentabilité incluant tous les coûts de mise en conformité
Les outils pratiques à votre disposition
Données de consommation réelles
Les experts doivent maintenant consulter les historiques Linky (électricité) et Gazpar (gaz) pour évaluer les consommations effectives, plus fiables que les projections DPE.
Votre intérêt : Ces données donnent une image plus juste de la performance énergétique réelle de votre bien.
Nouveaux modèles de rapports
Les EVS 2025 imposent des rapports plus détaillés incluant :
- Analyse systématique des facteurs environnementaux
- Évaluation des risques climatiques (inondation, sécheresse)
- Estimation chiffrée des améliorations possibles
Questions pratiques fréquentes
« Mon bien est classé E, dois-je m’inquiéter ? » Pas dans l’immédiat, mais anticipez l’échéance 2034. Les biens E bien situés et en bon état général gardent leur attractivité.
« Les travaux d’amélioration énergétique sont-ils rentables ? » Cela dépend du bien et de la situation. Les nouvelles méthodes d’évaluation permettent de calculer plus précisément cette rentabilité au cas par cas.
« Ces règles s’appliquent-elles partout en Europe ? » Oui, mais avec des adaptations nationales. En France, elles complètent la réglementation existante sur les logements décents.
L’essentiel à retenir
Les EVS 2025 actent la fin de l’évaluation immobilière « à l’ancienne ». L’efficacité énergétique devient un critère technique incontournable, au même titre que la localisation ou l’état du bien.
Cette évolution peut sembler contraignante, mais elle apporte plus de transparence et de réalisme dans les transactions. Elle force aussi une anticipation salutaire des enjeux énergétiques, bénéfique à long terme pour tous les acteurs du marché.
Pour naviguer sereinement dans ce nouveau contexte : informez-vous, faites-vous accompagner par des professionnels à jour de ces évolutions, et n’hésitez pas à anticiper plutôt qu’à subir les changements.